L'édition 2012 du petit Larousse qui vient de sortir inclut un nouveau mot dont la présence était attendue, pour ne pas dire espérée, mais dont la définition est pour le moins décevante :
Présentéisme n.m. Fait d’être assidûment présent, notamment sur le lieu de travail.
Interpellé, je me décide à vérifier les fondamentaux du vocabulaire :
Assiduité n.f. Régularité à se trouver où on doit l'être.
Ainsi le présentéisme serait le fait d'être régulièrement présent sur le lieu de travail. Que les spécialistes m'expliquent la nouveauté de ce concept par rapport aux engagements inclus dans le contrat de travail. Ceci est donc extrêmement décevant au regard de l'importance des enjeux de sensibilisation à propos de la prévention de la souffrance au travail, du stress et des risques psychosociaux.
La définition choisie pour ce nouveau mot m'évoque trois questions :
- La "valeur travail" est-elle à ce point dévalorisée qu'il faille désormais créer un nouveau nom commun pour celles et ceux qui sont assidûment présents au travail ?
- Les conditions de travail sont-elles tellement dégradées que la seule présence régulière au travail serait un exploit méritant une appellation propre ?
- Le fait d'être présent avec assiduité serait-il un gage de qualité et de productivité qui aurait le mérite d'être signalé ?
Outre le fait qu'elle nous perd dans de tristes conjectures, cette définition a surtout pour tord de nous écarter des vrais problèmes. Car si l'absentéisme désigne le fait d'être assidûment absent et le présentéisme le fait d'être assidûment présent, comment alors dénommer l'attitude d'être physiquement assidu au travail et mentalement assidu hors du travail ? Car en vérité c'est ce phénomène qu'il faudrait répertorier, étudier et prévenir. C'est vers la présence passive des salariés épuisés ou démotivés que nous devrions porter notre attention. Nous pourrions appeler ce phénomène présabsentéisme s'il n'avait pas déjà une définition. En effet, selon Wiki, le présentéisme désigne chez les pragmatiques d'Amérique du Nord "le fait d'être physiquement présent au travail sans avoir la productivité attendue, que ce soit dû au salarié ou à l'organisation."
Tant que nous ne saurons pas orienter notre attention vers le vrai drame des entreprises, celui du présentéisme (lorsqu'il est défini comme le désengagement chronique des salariés) le voeu de la performance durable sera vain.
Bonjour,
RépondreSupprimerIntéressant, en fait c'est la valeur travail qui change avec l'évolution des conditions de vie des salariés et les tâches qui deviennent davantage cognitives et complexes. Depuis mai 68 et la fin du travail proclamée, les salariés réfléchissent davantage et ont des besoins supérieurs, par exemple prendre la planche de surf quand il fait beau et finir le dossier le soir en écoutant de la bonne musique, ce que peut d'entreprises acceptent de nos jours malgré une productivité croissante...Je rappelle l'excellent livre du sociologue américain Donald ROY sur le "freinage ouvrier", les salariés viennent à limiter volontairement leur travail pour protester, le présentéisme n'est qu'un mot, il faut en effet aller plus loin pour comprendre les dynamiques sociales et en tirer des enseignements.
Bien cordialement,